L'apprenant en traduction face à l'outil nouvelle génération : ses interrogations et espoirs pour l'avenir de la profession traduisante
Hanna Martikainen  1, *@  , Alexandra Mestivier  2, *@  
1 : Centre de Linguistique Inter-langues, de Lexicologie, de Linguistique Anglaise et de Corpus  (CLILLAC-ARP)
Université Paris Diderot - Paris 7 : EA3697
2 : Centre de Linguistique Inter-langues, de Lexicologie, de Linguistique Anglaise et de Corpus  (CLILLAC-ARP)  -  Site web
Université Paris VII - Paris Diderot : EA3967
Université Paris Diderot Bât. Olympe de Gouges case postale 7046 75205 Paris cedex 13 -  France
* : Auteur correspondant

Le secteur de la traduction est aujourd'hui confronté à un bouleversement majeur qui entraînera à terme une mutation profonde des métiers de la traduction. L'arrivée sur le marché de moteurs de traduction automatique (TA) neuronale extrêmement performants aura sans doute pour conséquence de transformer la majeure partie de l'activité actuelle de traduction pragmatique en post-édition (PE). Nous présentons ici les premiers résultats d'une série d'investigations en cours auprès d'étudiants de Master 1 et 2 en traduction spécialisée explorant leur perception de l'avenir de la profession et de son évolution inévitable.

Les résultats d'une première expérience menée auprès d'étudiants de Master 2 sont sans équivoque : les apprenants ayant post-édité un texte médical spécialisé pré-traduit par un moteur neuronal de pointe ont effectué cette tâche en moyenne deux fois plus vite que leurs confrères traduisant le texte à partir de zéro, et pour une qualité finale meilleure. L'enquête menée auprès des mêmes étudiants confirme que l'époque où la TA provoquait, au mieux, une appréhension rétive, au pire, des ricanements francs – généralement mérités – est définitivement révolue. Les apprenants d'aujourd'hui ont une vision très positive de la TA : 32 % de nos répondants la trouvent ‘très utile' et l'utiliseraient volontiers dans un contexte professionnel ; 68 % la voient comme ‘potentiellement utile'. Les étudiants sont par ailleurs habitués à la présence de l'outil : 47 % disent avoir eu ‘souvent' l'occasion de l'utiliser, 50 % l'ont déjà utilisé ‘un peu'. Enfin, malgré quelques craintes concernant l'impact potentiel de la TA, les apprenants n'ont pas pour autant peur de se faire remplacer par la machine, mais plutôt l'espoir que l'outil les libérera : « C'est top. Pas parce que c'est moins de travail, mais parce que ça veut dire qu'on peut consacrer plus de temps aux détails en se débarrassant des éléments qui sont faciles mais qui prennent du temps ».

Bibliographie

HASSAN, Hany, AUE, Anthony, CHEN, Chang, et al. Achieving Human Parity on Automatic Chinese to English News Translation. arXiv preprint arXiv:1803.05567, 2018.

MOORKENS, Joss. What to expect from Neural Machine Translation: a practical in-class translation evaluation exercise. The Interpreter and Translator Trainer, 2018, p. 1-13.

PROU, Daniel. Neural machine translation: what does it mean for translators? Présentation au colloque The Language Industry 4.0: Embracing the future?, 9-10 mars 2018, Breda, Pays-Bas.

Note biographique

Hanna Martikainen prépare une thèse en langues appliquées à l'Université Paris Diderot sur les sources de distorsion dans les résumés médicaux traduits dont l'objectif est de comparer la traduction conventionnelle et la traduction automatique post-éditée. Elle y a enseigné notamment la linguistique de corpus appliquée à la traduction et à la terminologie, ainsi que la post-édition de traduction automatique en langue de spécialité médicale.

Alexandra Mestivier est Maître de conférences en linguistique anglaise à l'université Paris Diderot – Paris 7 où elle enseigne les outils d'interrogation des corpus, les outils de TAO et la traduction spécialisée. Elle est membre de l'équipe d'accueil CLILLAC-ARP. Ses principaux axes de recherche portent sur la linguistique de corpus, le TAL, la terminologie et la phraséologie, et la traduction spécialisée.


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